Les indicateurs de santé périnatale fournis par la DREES (direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques) en avril 2022 et partagés par l’association SOS Préma révèlent que 55 000 bébés prématurés naissent par an en France. Un autre rapport signale par ailleurs que les chiffres ne cessent d’augmenter, passant de 5,9 % des naissances en 1995 à 7,4 % en 2010, soit une augmentation de près de 15 % en 15 ans. Dès lors, la prématurité ne constitue pas une exception, mais un véritable sujet de santé publique. À ce titre, la France envisage d’expérimenter le suivi à domicile des bébés prématurés pour mieux accompagner les parents et réduire la durée de l’hospitalisation. Comment cet essai va-t-il se mettre en place, en quoi consiste-t-il et quels seraient les bénéfices pour les familles ? Nous vous proposons d’en apprendre davantage sur cette mesure dans cet article.
Sommaire
Rentrer à la maison sans son bébé : un déchirement pour les parents
La prise en charge de la prématurité nécessite une présence à l’hôpital durant plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Cette hospitalisation signifie que les parents ne peuvent pas rentrer chez eux avec leur enfant et doivent retourner à leur domicile seuls. Cette absence, couplée à l’inquiétude qui submerge les familles dans l’attente de la prochaine rencontre, représente une grande souffrance. Sarah dans son témoignage sur l’accompagnement des soignants en néonatalogie exprime clairement ce déchirement :
« C’était très dur de rentrer chaque soir à la maison en laissant mon bébé seul dans son incubateur. »
En plus de craindre pour la santé de leurs petit⸱e⸱s costauds, les parents doivent surmonter la séparation, l’éloignement et la gestion logistique de cette nouvelle routine qui s’installe. Les trajets de la maison à l’hôpital et de l’hôpital à la maison emplissent les journées. Parfois, cette distance s’étend sur plusieurs kilomètres, ce qui en augmente l’aspect chronophage et fatigant. Cet aspect pratique perturbe d’autant plus qu’il ne constitue pas l’unique préoccupation des parents qui font déjà face à un bouleversement sans précédent.
Ce tourbillon, Laure et Gaël le décrivent parfaitement dans l’article concernant le rapport des 1 000 premiers jours :
« Le deuil d’une grossesse et d’un début de parentalité normaux n’est pas aisé, d’autant qu’il se fait dans un quotidien chamboulé, où pèse l’incertitude constante de l’état de santé du.des bébé.s, dans un rythme aliénant, jour après jour, marqué par les aller-retour à l’hôpital, les soins, les rendez-vous médicaux, l’incompréhension parfois de l’entourage. »
La néonatologie à la maison : une expérimentation inspirée du modèle suédois
Plusieurs pays européens voisins, notamment la Suède, ont décidé de procéder autrement dans la prise en charge de la prématurité. En effet, les nouveau-nés prématurés sont suivis médicalement chez eux et non plus à l’hôpital. Ainsi, les équipes de néonatalité suédoises se déplacent pour effectuer les soins et réalisent le suivi du bébé à domicile.
Le ministère de la Santé souhaite désormais proposer cet accompagnement en France pour changer la vie de milliers de familles. Comme l’explique Charlotte Bouvard, présidente de l’association SOS Préma :
« Le projet a été porté par SOS Préma et la Société Française de Néonatalogie et nous sommes très heureux de son aboutissement ».
Après la parution du décret n° 2022-524 dans le Journal officiel le 11 avril 2022, un appel à projets sera lancé afin de sélectionner une dizaine d’équipes hospitalières pour concrétiser la mise en place de ce suivi. L’expérimentation d’une prise en charge à domicile se déroulera sur trois ans, ensuite le dispositif pourrait être généralisé.
Le suivi médical à la maison serait proposé pour « les nouveau-nés prématurés dont l’état de santé ne justifie plus le maintien à temps complet dans l’unité de néonatologie, mais requiert des soins d’une qualité et d’une technicité équivalentes à celles que délivre l’équipe de néonatologie lors de la prise en charge hospitalière. »
Charlotte Bouvard, déclare ainsi : « Le fait d’organiser une arrivée à domicile suivie par des professionnels de santé présents pour l’enfant est sécurisant et totalement rassurant pour les parents ».
L’éligibilité au dispositif demeure cependant restreinte aux familles dont le domicile se situe à proximité du lieu d’implantation d’un service de néonatologie afin de simplifier l’intervention d’une équipe mobile. Celle-ci sera composée d’un·e pédiatre expérimenté·e en néonatologie et d’au moins un·e infirmier·ère spécialisé·e en puériculture, placé·e·s sous la responsabilité d’un·e cadre.
Le suivi à domicile des bébés prématurés : une idée qui a du sens
La charte du nouveau-né hospitalisé, une autre initiative portée par l’association SOS Préma et la Société Française de Néonatologie (SFN), a mis en évidence l’importance d’envisager les parents comme véritables partenaires de soins. L’objectif annoncé était alors de mettre fin à la séparation des parents et de leurs enfants.
Le dispositif de prise en charge à domicile des bébés prématurés s’inscrit dans cette lignée, il valorise l’importance du rôle protecteur des familles, la nécessité de leur présence continue auprès de leur petit·e costaud et réunit les conditions nécessaires pour créer un lien d’attachement. Replacer les parents au cœur des soins, c’est d’ailleurs tout l’objectif des soins de développement et du programme NIDCAP (Neonatal Individualized Developmental Care Assessment Program).
Charlotte Bouvard résume ainsi les aspects bénéfiques d’une prise en charge à domicile des bébés prématurés :
« des études ont montré que cela permet d’améliorer le développement du nourrisson et la relation parents-enfants. Dans de nombreux cas, le “peau-à-peau” ou l’allaitement, facilités par la présence du bébé à la maison, représentent des soins à part entière ».
Même si l’inquiétude liée aux enjeux de la prématurité ne s’efface pas, le suivi à domicile des bébés prématurés avec des professionnels de santé permet de réduire le temps d’hospitalisation et d’envisager un quotidien plus doux au chevet des petit⸱e⸱s costauds qui ont tant besoin de leurs parents près d’eux. Nous resterons attentifs aux évolutions des prochaines années, en espérant que les mesures continueront sur cette voie !
Si vous souhaitez découvrir d’autres sujets sur la prématurité et la parentalité, n’hésitez pas à visiter notre blog. Nous partageons également de nombreuses ressources dans nos newsletters et sur nos réseaux sociaux (Facebook et Instagram).
Derniers commentaires