Vous souvenez-vous quand sont sortis les différents objets numériques qui font aujourd’hui partie de notre quotidien ? La télévision date des années 60, le smartphone a vu le jour en 2000 et la tablette est apparue en 2012. Même si nous avons l’impression de toujours avoir vécu avec, les technologies que nous côtoyons chaque jour possèdent un passé récent. Si au départ leur utilisation était limitée, aujourd’hui leur démocratisation touche un public de plus en plus jeune. En matière éducative, les recommandations prescrivent d’éloigner les enfants de moins de 3 ans des écrans, puis d’introduire et d’accompagner leur insertion progressive dans le quotidien. Pourtant, la réalité est tout autre. Une étude de l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) du 22 novembre 2022 révèle que seuls 4 enfants sur 10 restent à distance des outils numériques pendant leurs six premières années de vie. Quels sont vraiment les effets de l’écran sur le développement de l’enfant, quelle attitude adopter en tant que parents et est-ce différent pour nos bébés prématurés ? Nous abordons toutes ces questions dans cet article.
Nous ne sommes ni médecins ni psychologues, nos contenus ne doivent pas être considérés comme des avis médicaux. Pour toute question médicale, consultez un professionnel.
Sommaire
- 1 Que disent les études sur les effets de l’écran pour le développement de l’enfant ?
- 2 Pourquoi les écrans posent-ils problème ?
- 3 Quelles sont les recommandations concernant l’exposition aux outils numériques ?
- 4 Comment limiter l’exposition aux écrans en tant que parents ?
- 5 Qu’en est-il pour nos enfants prématurés ?
Que disent les études sur les effets de l’écran pour le développement de l’enfant ?
Une étude de l’Insee publiée le 22 novembre 2022 montre qu’un quart des enfants âgés de deux ans sont exposés aux écrans numériques, hors télévision, et y consacrent en moyenne 20 minutes par jour. Plus les petits grandissent, plus ces chiffres suivent la cadence. À partir de 5 ans et demi, 54 % des enfants passent environ 50 minutes par jour sur un ordinateur ou une tablette.
Justine Atlan, directrice de l’association e-Enfance déclare ainsi sur Franceinfo que les demandes d’intervention pédagogiques se réalisent de plus en plus tôt : « avant, c’était les écoles, maintenant, ce sont les maternelles ».
Une étude canadienne a mis en évidence que l’exposition de manière prolongée à la télévision chez les petits de 0 à 2 ans entraîne une diminution des activités motrices et cognitives. Certains neuropsychiatres tels que Boris Cyrulnik affirment qu’un enfant de moins de 3 ans ne devrait pas avoir accès à un écran afin de favoriser le lien et l’échange si essentiel à son développement.
Par ailleurs, plusieurs études établissent un parallèle entre la sédentarité due à l’utilisation des écrans et l’apparition d’un surpoids chez les enfants.
Pourquoi les écrans posent-ils problème ?
Les tout-petits ont besoin d’établir des contacts avec les autres et de réaliser de multiples activités d’éveil pour se développer. Cependant, ces interactions risquent d’être limitées si les écrans deviennent une occupation centrale dans leur quotidien. En effet, plus un enfant passe de temps devant un écran, moins il en reste pour jouer et échanger avec les autres.
D’autre part, certains parents pensent que l’exposition aux écrans calme leur enfant lorsqu’il se montre trop excité ou colérique. Au contraire, cette stratégie surstimule les tout-petits au lieu de les apaiser en raison des effets visuels et sonores. De plus, avoir recours à cette technique régulièrement ne permet pas aux enfants d’apprendre à réguler leur humeur et leur émotion : ils ne peuvent pas se fier aux écrans pour y parvenir.
Certaines conséquences associées à une exposition excessive aux écrans ont été mises en avant par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire) comme des troubles de la mémoire, du sommeil ou de l’attention, ainsi que d’autres effets secondaires potentiels comme l’isolement social ou la dépression.
L’association e-Enfance relève d’autres effets néfastes tels que :
- des problèmes de concentration à l’origine d’une baisse des résultats scolaires ou entraînant un repli sur soi ;
- des conséquences physiques comme de la fatigue oculaire, une mauvaise posture, des migraines ou un surpoids en raison de l’inactivité ou du grignotage ;
- des troubles du comportement avec des changements d’attitude et d’humeur, mais aussi une baisse de l’estime de soi ou un stress accentué.
Bien que la dépendance aux écrans ou aux jeux vidéo pour les enfants en bas âge reste rare, cette habitude n’encourage pas le développement d’un rapport sain avec ces technologies. Le risque d’adopter un comportement excessif plus tard se trouve ainsi renforcé.
En cas de doute sur le rapport de votre enfant aux écrans, n’hésitez pas à demander conseil à un professionnel de la petite enfance ou à votre médecin traitant.
Quelles sont les recommandations concernant l’exposition aux outils numériques ?
La Société canadienne de pédiatrie (SCP) et les Directives canadiennes en matière de comportement sédentaire pour les enfants âgés de 0 à 4 ans et pour les enfants et les jeunes recommandent :
- aucune exposition à tous types d’écrans pour les bébés de moins de 2 ans ;
- une exposition maximale de 1 heure par jour, tous appareils confondus, de 2 à 5 ans ;
- éteindre les écrans au moins 1 heure avant l’heure du coucher pour éviter l’apparition de troubles du sommeil comme l’insomnie ;
- un temps d’écran maximal de 2 heures par jour pour les enfants de plus de 5 ans, tant que l’utilisation ne nuit pas aux activités scolaires, physiques et sociales.
Le psychanalyste Serge Tisseron a également développé les repères 3-6-9-12 pour adapter l’équipement à l’âge des enfants :
- pas de télévision avant 3 ans ;
- pas de console de jeu avant 6 ans ;
- pas d’internet non accompagné avant 9 ans ;
- pas de réseaux sociaux avant 12 ans.
Comment limiter l’exposition aux écrans en tant que parents ?
Les écrans détiennent une place de choix dans nos foyers. Aujourd’hui, nous possédons en moyenne 4 écrans par famille, alors que nous n’en avions qu’un quinze ans plus tôt. Entre la télévision, la tablette, les smartphones et les ordinateurs, limiter l’exposition aux écrans devient complexe.
Face à cette omniprésence, tant dans le milieu personnel que professionnel, les parents se disent parfois que plus leur enfant s’habituera tôt aux outils numériques, plus vite il développera une expertise. Cependant, nous venons de le voir, les conséquences d’une exposition précoce s’avèrent désastreuses pour le développement des enfants et leur comportement en société. Justine Atlan, directrice de l’association e-Enfance, déclare même : « On utilise d’autant mieux le numérique qu’on a pu développer ses capacités et compétences d’humain avant. »
En tant que parents, nous sommes des modèles pour nos enfants qui apprennent par mimétisme. Si nous passons de longues heures sur nos écrans, nous encourageons cette pratique dans notre famille. De ce fait, il peut être intéressant d’introduire des périodes sans écrans dans notre foyer pour privilégier une autre activité comme le bricolage, la lecture, la détente ou le sport. Nous pouvons également limiter notre propre consommation en coupant les notifications et en activant le mode avion pour profiter de ces espaces de déconnexion.
De la même manière, il est important de conserver un temps privilégié pour interagir, notamment au moment des repas ou avant de partir à l’école. Pour les enfants plus grands, vous pouvez également instaurer un jour sans écran, le dimanche par exemple, et en profiter pour essayer des jeux de société.
La psychologue Sabine Duflo conseille quant à elle d’adopter la méthode des 4 « Pas », pas d’écran le matin, pendant les repas, dans la chambre, avant de s’endormir. Pour instaurer ces nouvelles règles, vous pouvez expliquer les raisons à votre enfant afin qu’il comprenne l’interdiction au lieu de souhaiter la transgresser.
Qu’en est-il pour nos enfants prématurés ?
Un bébé prématuré n’est pas seulement fragile, comme l’expliquent Laure et Gaël dans l’article des 1 000 premiers jours. Ce·tte petit·e costaud né·e trop tôt présente une immaturité qui nécessite une installation particulière pour qu’il·elle puisse se développer à son rythme.
Comme vous avez pu le découvrir dans notre sujet consacré au développement du bébé prématuré ou celui sur les soins de développement, nos minis super-héros et super-héroïnes sont particulièrement sensibles aux stimulations de leur environnement.
À ce titre, le programme NIDCAP préconise de limiter les bruits et l’intensité lumineuse pour créer une atmosphère adaptée aux capacités des bébés prématurés. La surstimulation sonore et visuelle des outils numériques va à l’encontre de ces recommandations.
Lors de leur séjour dans le service de néonatalogie, les soignants ont insisté auprès de Laure et Gaël sur le fait de ne pas exposer leur enfant aux écrans avant trois ans :
« Lorsque notre fils était en pédiatrie néonatale, dernière étape avant son retour à la maison, les soignants avaient organisé un temps d’échange avec les parents du service. Ils nous ont alors sensibilisés sur deux points majeurs : “portez votre bébé autant que vous le souhaitez, ça ne sera jamais trop” et “pas d’écran avant 3 ans, laissez votre bébé prendre le temps de se développer loin des technologies, pour que toutes ses compétences se mettent en place et qu’il n’ait pas de surstimulation”. Un conseil que nous avons appliqué, mais nous devons avouer qu’aujourd’hui, à 3 ans passés, notre fils apprécie un épisode de dessin animé lors des trajets en train… Par contre nous n’utilisons pas les écrans à la maison quand il est avec nous. »
La généralisation des écrans aux plus petits est un phénomène récent qui ne cesse de prendre de l’ampleur. L’introduction des outils numériques dès le plus jeune âge ne garantit pourtant pas une maîtrise précoce de leurs subtilités. Les enfants ont besoin d’expérimenter, de jouer, de s’ennuyer et d’échanger pour développer toutes leurs capacités sociales et motrices. En favorisant des espaces de discussion, en limitant le temps de connexion et en valorisant des activités manuelles, vous agissez concrètement pour ne pas laisser les écrans prendre une place prépondérante au quotidien. Cette modération aura sûrement un impact positif sur les adultes aussi !
Et vous, quel est votre rapport aux écrans dans votre famille ? Nous serions ravis de recevoir votre témoignage sur ce sujet. Si vous le souhaitez, vous pouvez nous partager votre ressenti sur notre page contact, en message privé sur nos réseaux sociaux (Facebook et Instagram) ou dans les commentaires de cet article.
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